Quand Boostyourfilm propose sa vision du cinéma indépendant

“Le cinéma indépendant, c’est tout ce qui n’est pas Hollywood non ?”… Pas vraiment. Daniel Anton, président fondateur de Boostyourfilm propose une autre vision du cinéma indépendant.

Un film est considéré comme ‘film indépendant’ lorsqu’il est validé par le public et qu’il contient une valeur ajoutée“, pour Daniel Anton, co-fondateur de Boostyourfilm la définition est claire.

Il faut dire que beaucoup se cassent les dents sur cette définition. La notion de cinéma indépendant diffère d’un pays à l’autre, d’un festival à l’autre, d’un média à l’autre, voire d’une personne à l’autre. À ses débuts, il se définissait principalement contre et en opposition à la frénésie de l’argent d’Hollywood qui régit le cinéma depuis 1910. Le cinéma indépendant (défini dans les années 80) visait à s’émanciper des majors, le courant Indie (1990) désigne la frange la plus rentable du cinéma indépendant et Indiewood (2ème moitié des années 90) se positionne au croisement entre le système indépendant et hollywoodien. Janet Staiger (Professeur émérite à l’Université du Texas à Austin) estime que l’indépendance se fonde sur une pratique et non sur des critères économiques et institutionnels. Il considère que ce type de cinéma “nécessite avant tout un investissement émotionnel et intellectuel des spectateurs ayant […] une conscience morale”.

Daniel Anton va plus loin : “L’indépendance du film s’arrête à partir du moment où l’intérêt des créateurs se déporte sur l’argent”. C’est l’objectif d’un film qui fait son indépendance. Si l’audience est prise en compte avec une véritable histoire, le film est indépendant des logiques financières.

“Je ne mets pas forcément les majors en opposition avec le cinéma indépendant. Je pense simplement que c’est l’intérêt de réalisation qui prime. Pourquoi ne pas aller plus loin en disant qu’une major peut mettre de l’argent dans un film dit indépendant. À partir du moment où la valeur ajoutée est l’histoire qu’il raconte au public, on pourra considérer celui-ci comme indépendant. Mais il n’y a aucune prise de risque. Ce qui tue l’indépendance c’est avant tout l’exploitation à outrance des franchises, le moment où l’œuvre est corrompue par l’argent.”

Un système verrouillé en France

Par la structure publique du financement de la création audiovisuelle en Europe, l’expression de “film indépendant” n’a pas de sens. Tous les projets sont susceptibles d’être éligibles à subventions. En théorie… En fait, c’est faux, car ce qui pose actuellement problème, c’est le verrouillage du système. En France, par exemple, pour faire un film il faut faire partie du réseau. Un producteur doit avoir l’agrément du CNC et un diffuseur (chaîne de télé) comme partenaire pour avoir droit aux subventions. Les financements complémentaires privés entrent en jeu une fois les subventions assurées. Ce système ne permet plus l’émergence de nouveaux talents. Il faut connaître une personnalité établie dans le système (“la grande famille du cinéma”), pour être coopté, sinon on reste devant la porte. C’est la chape de plomb au-dessus du cinéma.

Aux États-Unis, les majors limitent l’émergence de nouveaux talents par leur manque de prise de risque, en Europe, c’est le système de subventions publiques. Si l’audience avait directement accès aux projets de films ou aux talents émergents, le panel créatif ne serait-il pas différent ?

Quentin Duforeau

Pour aller plus loin

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